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Non-recours aux droits sociaux : l’ampleur du phénomène expliqué en 6 aides clés

  • Photo du rédacteur: Kévin Saigault
    Kévin Saigault
  • 12 janv. 2018
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 31 mars 2021

Le non-recours aux prestations sociales représente plusieurs milliards d’euros non-distribués tous les ans. Loin des idées reçues, ce phénomène accentue la pauvreté et creuse les inégalités dans les territoires. Explications.


Un fléau. Le non-recours aux droits sociaux en France est estimé à 13 milliards d’euros par an, soit près de 500 € par an et par ménage. Bien plus médiatisée, la fraude aux prestations sociales est, elle, par comparaison, estimée à 4 milliards d’euros par an. Si les aides sociales sont parfois pointées du doigt à cause du coût qu’elles représentent pour la collectivité, notons toutefois que le non-recours a des conséquences économiques désastreuses pour les territoires.


Et pour cause : le non-recours permet de réaliser une économie budgétaire sur le court terme mais a un coût social bien plus élevé sur le long terme qui est, lui, bien plus difficile à chiffrer. L’aide personnalisée d’autonomie (APA) permet, par exemple, de financer des emplois d’aide à la personne et donc de financer des salaires, des cotisations, des impôts… Ne pas y avoir recours entraîne donc automatiquement un manque à gagner pour les territoires et fragilise les activités liées à ce secteur. L’ACS ou la CMU-C permettent, elles, aux plus démunis de bénéficier d’une meilleure couverture en matière de santé. Le problème est que, bien souvent, le non-recours à ces aides se traduit par un renoncement plus global aux soins. Il y a donc là un véritable enjeu de santé publique.


Pourquoi autant de non-recours ? Selon Philippe Warin, directeur de recherche au CNRS et co-fondateur de l'observatoire des non-recours aux droits et services (Odenore), quatre facteurs permettent d’expliquer l’ampleur de ce phénomène :

  • La non-information : quand une personne ignore tout simplement qu’elle a droit à une aide

  • La non-demande : quand une personne ne réclame volontairement pas une aide (complexité administrative, mauvaise expérience, honte…)

  • La non-réception : quand une personne ne reçoit pas l’aide à laquelle elle a droit (pièce administrative manquante, délais d’attente…)

  • La non-proposition : quand les agents administratifs ne proposent pas certaines aides



Le taux de non-recours est toujours d’au moins 10 % pour chacune des aides sociales, voire beaucoup plus pour certaines d’entre elles. Il est, par exemple, de 57 à 70 % pour l'Aide au paiement d'une complémentaire santé (ACS), selon les différentes estimations. De son côté, l'Odenore estime que le non-recours à cette aide représente 378 millions d’euros non-distribués par an. Fait marquant, les non-dépenses liées à cette aide seraient supérieures aux dépenses qui s’élèvent, elles, à 186 millions d’euros par an.


Pour autant, il est difficile de précisément calculer l’ampleur du non-recours aux droits en France. « Concernant les prestations les plus exposées au non-recours, en l'absence de données produites régulièrement par les pouvoirs publics, on ne dispose que de résultats sur la CMU-C et l'ACS, venant du fonds CMU. On en reste donc malheureusement à opérer des ‘coups de sonde’ », nous explique Philippe Warin.


Même si elles ne sont pas toutes récentes, certaines estimations réalisées par l’Odenore permettent de se faire une idée de l'ampleur du non-recours en France. Faisons le point en 6 aides clés.



Le RSA


Le revenu de solidarité active (RSA) permet d’assurer aux personnes les plus défavorisées un revenu minimum afin qu’elles puissent subvenir à leurs besoins. C’est ce qu’on appelle le revenu minimal. Il s’agit d’une des aides les plus importantes en France. Pourtant, selon une enquête de l’Odenore datant de 2011, pour les trois types de RSA, le taux de non-recours s’élève à 50 %, ce qui représente 5,3 milliards d’euros non-distribués tous les ans.


Les prestations familiales et logement


Les 12,5 millions d’allocataires de la Caf bénéficient d’aides (aides au logement, allocations familiales…) qui leur permettent de se loger et/ou de subvenir à leurs besoins. Problème, selon les estimations de l’Odenore, le non-recours à ces aides représenterait 4,7 milliards d’euros par an. Pour rappel, les Caf couvrent, au total, 32 millions de personnes, dont près de 14 millions d'enfants.


Les allocations chômage


Une première estimation de l’Odenore faisait état de 2 milliards d’euros d’indemnités chômage non-versées aux personnes qui y ont pourtant droit chaque année. En cause : pour bénéficier des allocations chômage, encore faut-il être inscrit à Pôle emploi. Or, de nombreuses personnes ne sont pas inscrites. L’Odenore a toutefois reconnu auprès de l’Unédic que cette estimation portant sur une année (2010) était probablement surévaluée.


L’APA


L’allocation personnalisés d’autonomie (APA), c’est 828 millions d’euros non-distribués par an. Comme indiqué plus haut, cette aide permet de financer des emplois d’aide à la personne. Elle participe donc indirectement au développement de l’économie locale.


La CMU-C


Très méconnue, la CMU-C est l’équivalent d’une complémentaire santé gratuite destinée aux plus modestes. En 2014, le taux de non-recours à cette aide se situait entre 64 et 77 %, précise le fonds CMU. Pour sa part, l’Odenore estime que cela représente 700 millions d’euros non-distribués par an.


L'ACS


L'Aide au paiement d'une Complémentaire Santé (ACS) a un fonctionnement assez similaire au CMU-C mais avec des plafonds de ressources différents. L'Odenore estime que 378 millions d'euros ne sont pas réclamés chaque année, soit deux fois plus que ce qui est versé dans le même temps (186 millions d'euros).



Le cas particulier des aides locales


Soulignons enfin qu'en plus des aides nationales, il existe une multitude d'aides locales. La ville de Paris propose, par exemple, une aide destinée aux personnes âgées ou en situation de handicap dans le but de financer leurs repas pris dans les foyers restaurants du Centre d'Action Sociale de la ville. La métropole bordelaise propose, elle, une aide à la rénovation énergétique pour les propriétaires occupants de maisons individuelles.


Le Fonds d'Aide aux Jeunes (FAJ) des Bouches-du-Rhône octroie, pour sa part, des aides financières aux jeunes qui, confrontés à des difficultés, souhaite réaliser une insertion sociale et professionnelle. Pour donner un dernier exemple : la région Hauts-de-France propose une aide à la durabilité des pratiques agricoles (PVE) pour les exploitants souhaitant lutter contre l’érosion des sols ou maintenir la biodiversité.


A chaque échelon de collectivités, son lot d'aides locales. C'est pourquoi il est très difficile, voire impossible, d'établir le taux de non-recours de ces aides. Encore plus méconnues que les aides nationales, il y a cependant fort à parier qu'elles représentent énormément d'argent non-distribué tous les ans.

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